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Anorexie mentale et boulimie
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Boulimie : mécanisme

C’était avant la première crise, avant le premier régime pour maigrir, avant même peut être y avoir pensé. C’était ce mal être, celui là même qui collait à la peau, qui laissait cette boule dans la gorge, ce curieux creux au ventre, cette faim qui ne se disait pas et dont l’alimentation n’était pas la cible.

C’était avant !

Et puis il y a eu ce régime. Rien de « majeur ». Rien qui fixe le souvenir, une remarque peut-être, 2 ou 3 kg pris sans bien comprendre comment, parfois seulement juste un regard qui « déshabille »… C’est là que le malaise a été activé. Activé, mais caché.

Pourquoi faut-il que cette jeune femme, devant un malaise indicible, qui ne dit pas son nom, pense : « il faut que je me mette au régime, je suis trop grosse » ?

« Trop grosse », quelle drôle de pensée chez cette jeune femme qui a si peu de poids dans sa tête. Peut-être justement est-ce de ce « si peu de poids » que naît le désir de tout maîtriser. Mais est-ce bien un désir ou plutôt un besoin ?

Dans l’échelle des maîtrises potentielles, cette jeune femme ne peut pas, c’est évident, s’assurer de la maîtrise des autres. Sinon peut être par leur regard… regard sur un poids plutôt que sur des formes !

Alors le régime commença. Parfois terriblement restrictif. Il y eut moins à manger… de moins en moins à manger. Pour combler ce vide justement. Mais le corps qui se vide ne l’entend pas de cette oreille : l’estomac s’étonne, l’intestin vidé de ces aliments si peu gras émet des bruits. Même qu’il enverrait bien au cerveau des signaux de détresse sous forme d’une douleur ! Même qu’il voudrait tout récupérer de cette alimentation dérisoire et ne plus rien laisser sortir (constipé dites-vous ? Évacuer dit-elle !)

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La boulimique ou femme-enfant…
Se bande les fesses ou les seins,
Se fait les joues roses et le teint pâle,
S’enferme dans sa bulle
Où ours et pantins appellent son Papa pour, avec elle…
Regarder les étoiles.

Le drame commence là. Dans cette faim. Dans cette frustration. Dans ce manque nutritif qui s’ajoute à ce vide (mental).

Avec la restriction alimentaire qui s’intensifie et se prolonge, le corps prépare la contre-attaque. Chaque cellule musculaire, chaque organe dans le ventre vient à manquer d’énergie. Comme dans un pays où les coffres des régions se seraient vidés, chaque commune envoie son petit messager de détresse. Parmi tous ces organes, il y a le foie, c’est à dire un kilo de cellules qui travaillent 24h/24, fabriquent, transforment, échangent... Il est impossible pour le foie de manquer d’énergie. Il lui en faut. Il en prend aux muscles. Il « bouffe » du muscle.

Les intestins en manque, le foie agité envoient des messagers (les hormones) vers le gouvernement (le cerveau). Message : manger. Exécution : immédiate. Niveau d’importance : urgence.

Il y a deux cerveaux en nous : le premier est le siège de la raison (il raisonne, il calcule, il projette). Le deuxième, plus archaïque, se nourrit des messages qui lui arrivent : message métabolique, message émotionnel… Ne vous en déplaise, c’est souvent lui qui gagne.

Face à l’urgence, il impose sa loi. Ce fut celle de la survie : ne pas manger est mortel, toujours. Alors ce cerveau archaïque nous dresse la table de l’excès alimentaire. Tout animal mis au régime restrictif se « venge » sur « la bouffe » dès qu’il en a l’occasion.

C’est bien de ce trop calorique, de ce manque d’énergie, qu’émerge la première crise de boulimie : le corps avide y cherche des calories faciles, le cerveau frustré y trouve à la fois une sensation forte et un certain soulagement. La violence de l’accès et l’apaisement qui en résultent sont malheureusement, pour la malade, une émotion qu’elle ne va pas oublier de si tôt.

D’autant plus qu’elle trouve là un plaisir fort et sans conséquence puisque le vomissement l’efface. Elle peut manger puisqu’elle va vomir ! Et c’est là parfois la seule émotion qui soit à sa portée. Il y a bien un peu de « culpabilité » mais la force de l’émotion l’emporte. Une deuxième crise survient, puis une troisième, puis une quatrième.

Parallèlement, de crise en crise, l’estomac se dilate et le vide à l’intérieur, lorsque la malade est à jeun, devient perceptible. Par ailleurs, au gré des vomissements, un réflexe conditionné s’installe : chez le sujet normal, l’arrivée d’aliments dans l’estomac ferme la porte d’entrée et ouvre la porte de sortie. Chez la malade boulimique, c’est tout le contraire. La porte d’entrée reste ouverte et la porte de sortie fermée. C’est bien pourquoi le vomissement peut devenir spontané. C’est bien pourquoi chez ces malades l’acidité gastrique remonte si souvent et abîme les dents.

Cela devient de plus en plus facile, mais malheureusement de moins en moins fort aussi. C’est un phénomène classique en physiologie. Tout phénomène qui se répète s’atténue.

La malade en est frustrée. Les conséquences métaboliques du vomissement (fatigue, brûlures, inconfort…) se font plus pesant. Et là la culpabilité d’avoir craqué se manifeste.

Alors culpabilité mais inquiétude aussi car le doute s’installe. Au début, vomir rassure mais rapidement la malade se pose la question.

Au début, un repas normal est suffisant pour apaiser toutes les angoisses de la patiente (petite dose pour grande sensation !). La répétition de la crise diminue cette sensation et la malade doit augmenter les quantités pour obtenir les mêmes doses de sensation parce que au fond, se dit elle, plus je mange, plus je pourrais remplir mon estomac et plus je pourrais vomir, et remanger, et puis quitte à craquer, autant le faire jusqu’au bout !

En conclusion, dans la boulimie, un certain nombre de conséquences physiologiques et psychologiques vont favoriser la répétition des crises et créer un véritable manque à leur arrêt. C’est ce qui explique pourquoi la seule psychothérapie (psychanalyse) ne suffit pas et qu’il faut aussi travailler sur le comportement alimentaire.

Publié en 2008