L’anxiété, en tant que trait de caractère ou état chronique, associe un état d’excitation quasi permanent, une perte d’appétit, des difficultés d’endormissement et un sentiment de doutes, sans que la cause puisse en être trouvée. Cette anxiété « maladie » se caractérise par un cerveau toujours en éveil, une pensée qui n’arrive pas à se fixer, une hyperstimulation cérébrale et un état de tension inconfortables. Cet état d’inconfort est présent dans la journée de façon presque permanente. Cette anxiété, qui dans ces cas n’a pas de cause extérieure, s’en cherche souvent une. Le malade porteur d’un « trait anxieux » en cherche souvent la cause à l’extérieur de lui : c’est telle situation ou telle personne qui le rend anxieux.
L’anorexie mentale, au bout d’un certain temps, associe hyperactivité physique et/ou psychique, état d’excitation, perte d’appétit, difficulté d’endormissement et doutes. Très souvent, les malades se disent anxieux : de l’avenir, des relations avec les proches… de tout.
Il y a donc une similitude qui mérite qu’on s’y arrête. L’anxiété et l’anorexie mentale ont de toute évidence des points communs.
L’anorexie mentale commence sept fois sur dix à la suite d’un régime pour maigrir. Mais l’anorexie mentale n’est pas un projet de minceur pour un objectif bien défini (plaire à ce garçon par exemple). Non, il s’agit souvent d’une réponse à un manque de confiance, à un doute. Ainsi, dans un cas sur cinq ou six environ, peut-on repérer, chez les futurs malades, une anxiété comme « trait de caractère ». Les parents ou la(le) malade disent : « elle(il) a toujours été anxieuse ». Mais si 15 à 20 % des malades atteints de troubles alimentaire étaient des personnes anxieuses avant, c’est qu’au moins quatre malades sur cinq ne l’étaient pas !
Les malades disent clairement qu’au début de leur maladie, elles ne ressentaient plus cette anxiété, lorsqu’elle existait. Elles se sentaient euphoriques, efficaces, pertinentes, dans une pensée très positive faite de maîtrise, de contrôle. C’est même sans doute pourquoi elles ont continué dans l’anorexie mentale !
Pourtant, plus tard dans la maladie, c’est environ trois malades atteints d’anorexie mentale sur quatre et 8 à 9 malades atteints de boulimie sur dix qui se disent anxieux. Donc, de toute évidence, le trouble du comportement alimentaire, à terme, induit l’anxiété ou la majore !
De façon très nette, on a pointé depuis longtemps des troubles obsessionnels compulsifs (TOC) chez les malades atteints de TCA.
Un TOC peut être défini comme la répétition excessive, perturbante, d’actions ou de comportements stéréotypés qui n’ont plus d’objet, de but : répétition d’actes de rangements, de ménage, de lavage, de vérifications (fermeture de portes, de gaz…) qui envahissent le champ de la pensées et qui s’auto-induisent. Le malade atteint de TOC, dès qu’il y pense, doit « vérifier » ou « refaire » ce qu’il vient de faire. Il sait bien qu’il l’a déjà fait, mais ne peut s’empêcher de le reproduire. S’il ne le fait pas, il ressent une anxiété nette, invalidante qui l’empêche de faire autre chose.
On trouve environ 15 à 25 % de malades atteints de TCA qui ont des TOC simultanés et non alimentaires. Un sur trois de ces malades porteurs de l’association TCA-TOC avait un ou des TOC avant l’installation du TCA. C’est donc beaucoup plus que dans la population générale.
De plus, si l’on inclut les TOC alimentaires, la fréquence augmente. En effet, beaucoup de malades atteints de TCA ont des TOC alimentaires ou nutritionnels : comptage des calories, passages pluri-quotidiens de la malade sur un pèse-personne, comportements ritualisés pour s’autoriser à manger (émiettements, lavage à l’eau pour éliminer la graisse, disposition spéciale obligatoire des aliments), voire pesée systématique des aliments…
Il existe donc bien un lien entre TOC et TCA. Il se pourrait bien que ce lien soit celui de l’état anxieux. En effet, l’anxiété est la caractéristique principale des personnes atteintes de TOC. Il pourrait s’agir ici d’une matérialisation de l’angoisse, plus facile à accepter si elle se retrouve dans des faits et comportements que si elle est immatérielle.
Mais un autre aspect du lien entre anxiété et TCA mérite d’être mis en avant : le TCA, en tant que tel, génère l’anxiété et/ou l’aggrave. Une preuve irréfutable de ceci est que la mise en place d’une sonde nasogastrique et d’une nutrition entérale diminuent notablement l’anxiété de ces malades. Ceci est particulièrement net en cas de boulimie.
Il pourrait y avoir plusieurs explications :
Face à ces réflexions, une dernière question se pose : s’il existe entre anxiété et TCA un lien si fort, est-ce que le traitement de l’anxiété, par des médicaments anxiolytiques ou une thérapie cognitivo-comportementale ou analytique, peut permettre la guérison du TCA ? Malheureusement, la réponse est connue : elle est négative. Une fois installé, le TCA évolue pour son propre compte, même si l’angoisse est traitée. A l’inverse, et c’est rassurant, beaucoup de malades voient disparaître leur angoisse à la guérison du TCA.
En résumé : |
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1- L’anxiété peut favoriser l’éclosion d’un TCA ; |
Publié en 2008