Anorexie, boulimie, compulsions alimentaires : l'association peut vous aider à voir les choses Autrement

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Définitions, physiopathologie, épidémiologie et maladies associées
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Boulimie : diagnostic


Pr Daniel RIGAUD, Nutrition

1. Critères de diagnostic de la boulimie

La boulimie est un trouble du comportement alimentaire (TCA). Elle s'appuie sur une pensée qui est la même que celle de l'anorexie mentale. Le diagnostic de boulimie repose sur deux critères simples :

  1. Crises compulsives alimentaires
  2. Puissant besoin de s'en débarrasser.

Pour parler de boulimie chronique, il faut donc :

  1. Des crises compulsives alimentaires au moins deux fois par semaine depuis au moins trois mois,
  2. Un ou des comportements compensatoires visant à "éliminer la crise" : le plus souvent (90 % des cas au moins) les vomissements provoqués, mais aussi le jeûne, le saut de repas, l'hyperactivité physique, l'abus de laxatifs. Ces comportements peuvent être associés.
                     









 



Pour parler de boulimie chronique, il faut donc :

Cinq points essentiels doivent être retenus :

  1. La pensée "anorexique" (une forte restriction cognitive) est puissante : les malades souffrant de boulimie "ne peuvent pas grossir". Ils ont la même peur de grossir, le même besoin de maigrir, le même besoin de contrôle de leurs repas restrictifs, les mêmes évictions d'aliments lors des repas, la même hyperactivité physique (au début) que les malades ayant une anorexie mentale à un IMC de 14-16 kg/m2. Ceci explique pourquoi 80 % de ces malades sont à IMC normal, entre 18 et 26 kg/m2. Dix pour cent sont un peu maigres (17,5-18,5 kg/m2) et dix pour cent seulement sont en surpoids ou obèses. Il y a moins de patients boulimiques en surpoids ou obèses que chez les femmes de même âge sans TCA.
  2. Le besoin de contrôle est important, même s'il contraste avec un "sentiment de forte perte de contrôle" pendant la crise elle-même. "Le contrôle est aussi fort que l'est le sentiment de perte de contrôle".
  3. Une crise boulimique est constituée d'une quantité importante d'aliments (de "choses alimentaires") : souvent une crise a la taille d'un repas, voire de deux ou trois repas. C'est énorme et certains malades sont obligés de se faire vomir plusieurs fois par crise… pour continuer.
  4. Les crises peuvent se succéder l'une l'autre, par exemple tout au long de la soirée, ponctuées de vomissements.
  5. Le caractère horrible des crises et l'intense sentiment de perte de contrôle induisent une asthénie, un dégoût de soi et des pensées suicidaires pour en finir avec les crises.

On le voit, la boulimie n'a rien à voir avec les crises compulsives non vomitives ("binge eating disorder" des anglo-saxons). Le tableau 1 illustre ces différences.

Il s'agit de TCA tout à fait différents, aussi bien en termes de diagnostic, de pronostic que de réponse aux traitements.

Les patients qui souffrent de compulsion sont le plus souvent en surpoids (40-50 % des cas) ou obèses (20-30 % des cas), tandis que celles qui souffrent de boulimie sont le plus souvent de poids normal.

Le dégoût de soi est moindre en cas de compulsion que dans la boulimie et les pensées suicidaires plus rares.

En cas de compulsion, il n'y a en plus aucune des complications engendrées par les vomissements et, donc, aucune surveillance de ce point de vue.

En revanche, dans la compulsion, les risques associés au surpoids et à l'obésité, c'est-à-dire les risques métaboliques et cardio-vasculaires, sont accrus, ce qui n'est pas le cas dans la boulimie.

De même, dans la compulsion, l'anxiété et l'état dépressif sont à un moindre niveau et plus rares que dans la boulimie.

Les crises de compulsion sont de fréquence et d'intensité assez stables dans le temps alors que la fréquence et l'intensité des crises de boulimie ne fait qu'augmenter ! Ceci fait toute la différence.

Tableau 1 : Différences entre boulimie et compulsion

 

Boulimie

Compulsion

Psychorigidité

++

+

Besoin de contrôle objectif

+++

+

Sentiment perte de contrôle

+++

+

Contrôle effectif

++

+

Impulsivité

++

+++

Pensée anorexique

+++

+  à  ++

Activité physique

+++

+

Anxiété

++

+ à ++

Etat dépressif

++

+

Dégoût de soi

+++

+

Suicidalité (et TS)

+++

+

Fréquence des crises

augmente

stable

Vomissements

+++

+

IMC

Stable

augmente

HTA, hyperTG,

non

Oui (15 %)

Dénutrition

présente

absente

Efficacité traitement

70-75 %

60-65 %

2. Conclusion

La boulimie est la "sœur ennemie" de l'anorexie mentale. La boulimie associe crises compulsives alimentaires fréquentes et intenses (très souvent quotidiennes) et vomissements provoqués ponctuant les crises de compulsion alimentaire. Dans la boulimie, l'IMC est normal. Les complications de la boulimie sont celles de la dénutrition, des carences nutritionnelles et des vomissements.

La souffrance et le dégoût de soi sont à la fois très fréquents et très forts dans la boulimie.

Contrairement à ce que bien des professionnels de santé pensent, la boulimie répond bien aux psychothérapies et aux trois types de médicaments qui ont fait la preuve de leur efficacité. Grâce à la sonde gastrique et à la nutrition entérale qui y est associée, on a par ailleurs un traitement très efficace contre les crises de boulimie dans les formes graves.

3. Pour en savoir plus

Inscrivez-vous à notre formation en e-learning sur les TCA et l'obésité

 

publié en avril 2018