Hélène PENNACCHIO, Association Autrement (Dijon)
Il faut mettre la(le) patient(e) souffrant d'anorexie en confiance, afin d'établir avec elle (lui) une véritable relation : l'écoute de l'autre implique la faculté " d'entendre " (dans le sens d'une compréhension à la fois intellectuelle et affective…).
Il ne s'agit pas seulement de se taire pour écouter. Ecouter suppose une attitude à la fois réceptive et perceptive.
Dans la relation avec le patient, il s'agit non seulement d'entendre sa parole, mais d'en saisir le contenu intellectuel et émotionnel, et de reformuler ensuite ce qui a été dit, afin que le patient se sente entendu et que le soignant puisse adapter son discours et sa prise en charge en conséquence.
N°1. Sachez reconnaître l'anorexie mentale : fixer à cette jeune fille maigre l'objectif pondéral minimal normal (indice de masse corporelle à 18,5 kg/(m)2). Si, elle refuse, c'est qu'elle est anorexique mentale.
3 autres facteurs définissent l'anorexie mentale |
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N°2. Sachez différencier l'anorexie restrictive (celle qui maigrit uniquement par la restriction alimentaire), de l'anorexie boulimique et/ou vomisseuse. En effet, ces deux formes n'ont ni le même pronostic à long terme, ni le même risque à court terme (hypokaliémie), ni de ce fait le même traitement.
N°3. Evaluer l'état nutritionnel : les critères cliniques doivent prévaloir (amyotrophie, fonte des plis cutanés, atteinte de la peau, des muqueuses et des phanères). Hormis l'hypokaliémie, le bilan biologique standard est le plus souvent normal : c'est un leurre ! Rechercher les oedèmes des membres inférieurs. Ils signent la gravité de la dénutrition et font surestimer le poids. Présents, ils nécessitent un régime hyposodé lors de la renutrition. Repérer vomissement et ou boulimie : visage soufflé, gonflement des parotides, hypokaliémie, alcalose métabolique, créatinémie et protidémie élevées.
N°4. Définir un objectif pondéral cohérent : au-delà de 15 ans, il faut que le malade atteigne à terme un indice de masse corporel de 18,5 (poids sur taille au carré).
N°5. Fixer le niveau des apports énergétiques. Ils ne doivent en aucun cas être inférieurs à la dépense énergétique totale au poids qui est l'objectif. Sachez déceler une hyperactivité physique qui augmente les besoins. Ne jamais donner de régime hypocalorique : prescrits de peur d'effrayer "en attendant mieux", ils fixent et valident le comportement alimentaire restrictif des malades.
Travaillez avec la malade sur son hyperactivité. Sachez la faire évoluer vers une activité physique ludique. Le sport n'a pas pour but de brûler des calories, mais de s'épanouir dans une relation à l'autre.
N°6. Travailler sur le comportement. Donner une bonne image des matières grasses et des féculents. Réintroduire de vrais repas avec une entrée, un plat (viande, poisson, œuf) avec sa garniture (moitié légumes verts, moitié féculents), un laitage (un fromage plusieurs fois par semaine), un fruit ou équivalent. Amenez les malades à manger " sous le regard de l'autre ", sans peur et sans reproche, en se lançant défi après défi.
N°7. Les troubles du comportement alimentaire sont l'expression d'un mal-être. Sachez analyser le type de relations qu'à noué la patiente souffrant d'anorexie avec son entourage : dépendance, méfiance, rejet…(isolement).
N°8. Travailler dans un deuxième temps sur les 10 points qui caractérisent l'anorexie mentale.
N°9. Ne pas penser que tout sera réglé en quelques semaines. Il faut 3 à 5 ans pour se sortir d'un trouble alimentaire. Persévérer, la guérison est toujours possible. Sachez avec elle jeter un autre regard sur son poids.
N°10. L'aménorrhée : sachez l'utiliser. Chez deux malades sur trois, l'aménorrhée apparaît autour d'un IMC de 18-18,5. Elle disparaîtra autour de 18,5, si l'alimentation est équilibrée. L'élément principal du retour à des cycles réguliers est donc la reprise pondérale. Au bout de 3 ans d'évolution, si cet objectif ne peut être atteint, prescrivez un traitement de type ménopause pour éviter l'ostéoporose.
Publié en 2003