Pr D. RIGAUD - CHU Dijon
Le médecin généraliste a un rôle essentiel dans la prise en charge nutritionnelle des patients qui viennent le consulter et de leur famille. Ce conseil est d’une double nature : préventive et curative.
Un programme National de Nutrition et Santé (PNNS) vient d’être lancé. C’est l’occasion de rappeler qu’au delà de ces recommandations, dont il n’est pas sûr qu’elles soient indispensables à la santé de certains groupes de sujets sains, il y a des recommandations ciblées, destinées à un malade donné. Le rôle du médecin généraliste est ici déterminant, car il est le seul à pouvoir effectuer un travail en profondeur.
Il serait en effet illusoire de croire qu’il suffit de distribuer des brochures, même jolies, de conseils nutritionnels à 20 millions de personnes, pour aboutir à un changement durable des comportements alimentaires inadaptés chez une personne donnée. Le médecin généraliste est l’interlocuteur privilégié du malade face à ses problèmes nutritionnels et alimentaires. Qu’il s’agisse de malades obèses ou atteints de troubles du comportement alimentaire, qu’il s’agisse de patients dénutris, quelle qu’en soit la cause, ou qu’il soit face à un malade à risque d’accident vasculaire, avant ou après le premier accident, le médecin doit mettre en place une stratégie efficace pour modifier durablement et profondément l’alimentation de son patient.
Une première raison est que les maladies nutritionnelles qui nécessitent un travail de fond sur le comportement alimentaire sont fréquentes :
Une deuxième raison motive cette attention : beaucoup de ces malades souffrent des complications de ces affections : ainsi un pourcentage notable des malades obèses est porteur d’hypertension artérielle, de coronaropathie, de risque accru de thrombo-embolie, de syndrome d’apnée du sommeil, de diabète, d’hypertriglycéridémie, d’hypocholestérolémie-HDL… En vingt ans, le nombre de malades atteints de diabète de type II, non insulino-dépendant, a crû en proportion du nombre de patients souffrant d’obésité androïde. L’allongement de la durée de vie augmente aussi la fréquence des coronaropathies. Un bon nombre de malades atteints d’anorexie mentale ou de sujets âgés isolés souffrant d’anorexie d’origine diverse sont porteurs de dénutrition…
Je ne ferais que citer l’alcoolisme et sa fréquente dépendance.
Je n’évoquerais qu’à peine le risque de cancer, car rares en fait sont les cancers pour lesquels il est prouvé qu’une modification de l’alimentation en diminue la fréquence.
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En revanche, il faut particulièrement insister sur l’ostéoporose : plus qu’un risque, c’est une réalité pour une grande majorité de femmes de plus de 70 ans. Or le vieillissement de la population fait que le nombre de sujets âgés augmente (plus de 5 millions de femmes de plus de 75 ans dans dix ans). Et il existe une prévention nutritionnelle efficace. |
Il faut aussi souligner l’importance et la fréquence de l’hypercholestérolémie et de la prévention primaire de l’insuffisance coronarienne.
Et il faut conclure en insistant sur le fait que beaucoup de ces affections sont familiales et qu’une prévention est souvent nécessaire chez les parents du premier degré.
Apprécier l’état nutritionnel et son évolution, juger du risque d’affections liées à l’alimentation et à l’état nutritionnel, prescrire une alimentation adaptée et personnalisée, proposer des pistes pour modifier le comportement alimentaire et suivre l’évolution, telles sont les clés d’une prise en charge de qualité pour le médecin généraliste.
Publié en 2006