Anorexie, boulimie, compulsions alimentaires : l'association peut vous aider à voir les choses Autrement

Anorexie mentale et boulimie
Définition, symptômes et maladies associées
Anorexie mentale en trois maux Boulimie en trois mots Anorexie mentale et boulimie chez l'adolescent Anorexie mentale et effets métaboliques de la restriction alimentaire Anorexie mentale : entre appétit et peur Anorexie mentale et dépression Addictions et anorexie mentale Anxiété dans l'anorexie mentale et la boulimie Besoins caloriques et dépenses énergétiques Boulimie et dépression Cette douleur-ci contre cette douleur-là Émotions et TCA Environnement, anorexie mentale, boulimie et obésité État dépressif en cas d'anorexie mentale et de boulimie Hyperactivité physique en cas d'anorexie mentale et de boulimie La sensorialité et TCA Le mérycisme : un comportement de dépendance fréquent dans l'anorexie et la boulimie Les troubles du comportement alimentaire chez les 6-12 ans Peut-on déceler tôt l'anorexie mentale et la boulimie ? Peut-on parler de drogue en cas d'anorexie mentale, de boulimie et de compulsions alimentaires ? Tabagisme et troubles du comportement alimentaire : un lien ? Troubles du comportement alimentaire et conduites addictives
Causes et mécanismes Descriptions et complications Etudes scientifiques Traitement Autour des TCA
Obésité et compulsions alimentaires Diététique & Nutrition

Anorexie mentale et boulimie chez l'adolescent


L’anorexie mentale et la boulimie sont des troubles du comportement alimentaire où le symptôme est l’expression d’un mal être et de peurs qui dépassent de beaucoup l’alimentation, l’amaigrissement ou les vomissements.

L’élément fondamental, chez l’adolescent, est de ne pas " diaboliser " une anomalie sans conséquence des conduites alimentaires. Une autre attitude perverse serait de traiter " dans l’urgence " et sans tenir compte des spécificités de l’adolescent et de son environnement génétique et familial un surpoids modeste ou modéré, à cette période de la vie où le corps change et parfois " s’enrobe " (notamment chez la fille), avant la poussée de croissance.

A l’inverse, il faut savoir, devant une demande " banale ", formulée par la mère ou le sujet, dépister un trouble du comportement alimentaire.

Les troubles du comportement alimentaire sont l’expression d’un mal-être. Le traitement des troubles du comportement alimentaire déstabilise les malades et réactive l’angoisse.

1. Définitions

Il faut distinguer conduites et comportements, anomalies et troubles.

Une conduite alimentaire est une manière de manger : manger les plats dans un ordre donné, boire en mangeant, manger à 18 h sont des conduites alimentaires.

Le comportement alimentaire représente l’investissement du sujet (positif ou négatif) dans une conduite alimentaire donnée : manger debout, manger seul, manger vite, manger avec avidité, indifférence, manger avec appétit sont des comportements alimentaires.

Un trouble du comportement alimentaire consiste en un mal-être lié à un comportement " anormal " et à ses déterminants psychiques (angoisse, stress, dépression) : ainsi un vomissement prandial socialement accepté (comme chez les patriciens Romains) n’est pas un trouble du comportement alimentaire ; une crise de boulimie hebdomadaire qui induit des idées suicidaires si !

L’anorexie mentale répond à une volonté active de restreindre son alimentation et de perdre du poids.

La compulsion alimentaire est la consommation en un temps court d’une quantité assez importante d’aliments choisis, avec une connotation de plaisir, même s’il y a ensuite le sentiment d’avoir perdu le contrôle. Elle n’est en règle pas suivie de vomissements.

La crise boulimique est la consommation en un temps court d’une quantité importante ou massive d’aliments non choisis, sans aucune connotation de plaisir, sans faim ni rassasiement, avec un fort sentiment de perte de contrôle. Elle est suivie de vomissements et d’un dégoût de soi qui peut conduire au suicide.

Le grignotage pathologique est la consommation en un temps assez long, par petites quantités répétées, d’aliments choisis, sans sensation de faim et avec une connotation de plaisir très modérée.

2. Anorexie mentale

anorexie_maladie.png 

L'anorexie mentale est caractérisée par une peur intense de grossir et de s'alimenter. Il s’agit de femmes (95 % des cas). Le début est entre 15 et 25 ans. La fréquence de la maladie augmente : 1 à 1,5 % des femmes de cet âge. On en distingue 2 types :

- l’anorexie restrictive, où la malade maigrit par le jeûne qu’elle s’impose ;

- l’anorexie-boulimie, où les crises de boulimie terminées par des vomissements spontanés ou provoqués viennent entrecouper la restriction alimentaire.

La forme restrictive pure se complique souvent d’une dénutrition souvent grave. L’anorexie-boulimie aboutit plus rarement à une dénutrition sévère, mais génère une hypokaliémie parfois majeure et honte et dégoût de soi.

L’anorexie mentale se développe sur un fond de manque de confiance en soi, qui conduit à un besoin intense de se sentir fort, "compact", "dur". Toutes les situations qui renforcent cette sensation sont valorisées. A l'inverse, toutes les situations qui contribuent à évoquer une déperdition vers l'extérieur, une mollesse, un assoupissement provoquent l’angoisse et sont rejetées.

L'activité physique et le jeûne alimentaire sont valorisés. La fierté d’avoir dépassé ses limites renforce la sensation de puissance de la malade.

En revanche, le repas s'accompagne d'une déperdition énergétique (la thermogénèse post-prandiale), d'une "fuite de conscience" (la somnolence) et d'une augmentation de volume de l'abdomen qui évoque la mollesse (des tissus, de la graisse) et fait craindre d'être bientôt " entouré de gras ".

Ces sensations se renforcent au fil de la perte de poids. Même au stade de dénutrition grave, elles continuent d'activer le processus. Le repas est vécu comme une agression, alors que les patientes tirent souvent un plaisir ou un "bénéfice" du jeûne qu'elles s'imposent. Le jeûne procurerait aux malades une sensation de toute puissance que le repas mettrait à mal, entrainant un syndrome de manque. Il pourrait s'agir là d'une toxicomanie vraie, avec satisfaction sensorielle initiale, répétition, puis dépendance.

La restriction alimentaire conduit à un état de dénutrition parfois sévère qui peut entraîner le décès (10 à 15 % des malades après 15 ans d’évolution).

3. La boulimie

La boulimie obéit à un tout autre processus. Il s'agit de l'ingestion massive d'aliments hypercaloriques, non sélectionnés, à l'abri des regards. L'accès se termine par des douleurs abdominales, des vomissements provoqués ou non, ou l'endormissement. Le rassasiement n'opère plus, car la pensée est hors du champ du contrôle de la prise alimentaire, dans une extinction des sensations où la pulsion a envahi toute la conscience : ce n'est pas la faim qui a " ouvert " à la prise alimentaire, ce n'est pas le rassasiement qui la " fermera ".

Il y a conscience du trouble, et angoisse de la perte de contrôle. Ceci génère des tentatives constantes d'amaigrissement par régimes draconiens ou jeûne, par laxatifs ou diurétiques. Les boulimiques ne sont quasi jamais grosses ! Une humeur dépressive accompagne ou suit les crises. L'auto-dépréciation est la règle et les idées suicidaires fréquentes.

Lors des repas, le rassasiement est accru par l'angoisse de prendre du poids, et, chez certaines boulimiques, un processus assez proche de l’addiction, de la dépendance s’installe : malgré son désir et sa volonté, la malade ne peut échapper à la crise.

Le risque ici est celui des vomissements répétés : parotidose et parotidite, oesophagite parfois, hypokaliémie surtout (avec ses risques de troubles du rythme cardiaque).

4. Prise en charge thérapeutique

La prise de poids dans l’anorexie, l’arrêt des vomissements ou des compulsions, par la rupture d’équilibre qu’ils engendrent, réactivent peurs et angoisses. Le projet thérapeutique place ces malades devant un énorme défi : guérir pour soi dans un projet d’avenir personnel défendu avec détermination.

La prise en charge doit donc être nutritionnelle, comportementale et psychothérapeutique.

4.1. Quatre objectifs sont fixés

  1. Obtenir un poids corporel normal,
  2. Avoir des apports nutritifs (énergie, lipides, micro-nutriments ...) compatibles avec ce poids,
  3. Retrouver un comportement alimentaire normal, sans peur et sans reproche,
  4. Travailler sur les caractéristiques psychiques qui ont générées et entretiennent le trouble.

Il importe que les malades passent par cinq phases incontournables :

4.2. Les cinq phases

  1. Prendre conscience
  2. Décider d’agir
  3. Acter sa décision
  4. Se donner les moyens du combat (travail, méthode)
  5. Persévérer

Dans ce cheminement, dix clés sont utiles à connaître car elles sont la base du fonctionnement de beaucoup de troubles du comportement alimentaire chez l’adolescent :

4.3. Les dix clés

  1. Le manque de confiance
  2. L’excès de perfectionnisme
  3. Le besoin de tout maîtriser et la peur de " lâcher prise "
  4. La perte de l’image de soi (difficulté à s’affirmer autrement que dans le refus)
  5. Le rejet du désir
  6. Le rejet de l’image de la femme (séduction, sexualité)
  7. La difficulté d’expression verbale et émotionnelle (la difficulté d’introspection)
  8. La tendance à la dissimulation et la méfiance vis à vis de l’autre
  9. L’attachement excessif à l’un des parents
  10. La peur de ne pas y arriver (à guérir, à vivre ...)