Anorexie, boulimie, compulsions alimentaires : l'association peut vous aider à voir les choses Autrement

Anorexie mentale et boulimie
Définition, symptômes et maladies associées
Anorexie mentale en trois maux Boulimie en trois mots Anorexie mentale et boulimie chez l'adolescent Anorexie mentale et effets métaboliques de la restriction alimentaire Anorexie mentale : entre appétit et peur Anorexie mentale et dépression Addictions et anorexie mentale Anxiété dans l'anorexie mentale et la boulimie Besoins caloriques et dépenses énergétiques Boulimie et dépression Cette douleur-ci contre cette douleur-là Émotions et TCA Environnement, anorexie mentale, boulimie et obésité État dépressif en cas d'anorexie mentale et de boulimie Hyperactivité physique en cas d'anorexie mentale et de boulimie La sensorialité et TCA Le mérycisme : un comportement de dépendance fréquent dans l'anorexie et la boulimie Les troubles du comportement alimentaire chez les 6-12 ans Peut-on déceler tôt l'anorexie mentale et la boulimie ? Peut-on parler de drogue en cas d'anorexie mentale, de boulimie et de compulsions alimentaires ? Tabagisme et troubles du comportement alimentaire : un lien ? Troubles du comportement alimentaire et conduites addictives
Causes et mécanismes Descriptions et complications Etudes scientifiques Traitement Autour des TCA
Obésité et compulsions alimentaires Diététique & Nutrition

Besoins caloriques et dépenses énergétiques


1. Contre l'anorexie et la boulimie

1.1. La dépense énergétique à poids stable

Pour assurer les différentes fonctions de son organisme, l'homme a chaque minute besoin d'énergie (il " brûle " des calories). Pour marcher, faire du sport ou assurer ses différentes activités physiques. Mais aussi pour que fonctionnent le cœur, les poumons, le foie, les reins et tous les autres organes et viscères indispensables à la vie.

Nous brûlons des calories pour couvrir trois postes de dépense :

  • Le premier poste est le plus important : c'est la dépense énergétique de repos (DER ou métabolisme de base). C'est ce que nous dépenserions par jour sans rien faire, pas même bouger un cil. Cette DER représente, chez un individu sédentaire, près des 2 tiers de la dépense totale.
  • Le deuxième poste est la dépense énergétique postprandiale, c'est-à-dire la dépense calorique nécessaire à l'assimilation, à la transformation et au stockage des aliments du repas. Cette dépense est de 15 à 20 % de la dépense totale.
  • Le troisième poste est la dépense liée à l'activité physique. Elle représente chez un individu sédentaire 15 à 25 % de la dépense calorique totale de la journée. Elle augmente bien sûr avec le niveau de l'activité physique.

1. La dépense énergétique de repos (DER)

Elle est fonction de cinq paramètres indépendants :

  • Le sexe : la DER est plus élevée chez l'homme que chez la femme. C'est la raison pour laquelle un homme peut manger plus qu'une femme, même à poids égal.
  • La taille : la DER est plus élevée lorsque la taille est plus grande. Un individu de grande taille peut maigrir avec un régime qui fait grossir un individu de petite taille.
  • L'âge : la DER est plus élevée chez le sujet jeune que chez le sujet âgé. C'est pourquoi, en mangeant pareil, un individu prend 5 kg entre 20 et 60 ans.
  • Le poids : un sujet gros, pour se déplacer, sollicite plus ses muscles. Donc la masse musculaire augmente. Et la DER aussi puisqu'elle dépend en partie des muscles.
  • Le contexte génétique : la DER est plus élevée chez les individus issus d'une famille de sujets minces que chez ceux issus d'une famille de gros. Un individu génétiquement maigre peut ainsi manger plus, parce qu'il brûle plus, qu'un sujet génétiquement gros.

Quelques exemples :

1er exemple : un homme de 20 ans, de 1,70 m et 80 kg a une DER de 1880 kcal/j. S'il a une activité physique moyenne pour son âge, il dépensera chaque jour 2800 kcal/j. A l'inverse, sa grand mère de 60 ans, mesurant 1,60 m et pesant 50 kg a une DER de 1130 kcal/j. Si elle a une activité physique moyenne pour son âge (et donc moindre que lui !) elle dépensera 1600 kcal/j. Elle a donc des besoins très inférieurs à ceux de son petit fils.

Autre exemple : Delphine, 20 ans, atteinte d'anorexie mentale et pesant 35 kg pour 1,63 m, a une DER de 1100 kcal/j. Pour maintenir ce poids, elle doit se restreindre à des apports caloriques de 1600 kcal/j. Si Delphine accepte de guérir et de peser 50 kg, elle pourra manger à hauteur de 2000 kcal/j. Si elle reste hyperactive, elle pourra même manger à hauteur de 2200 kcal/j, sans prendre un gramme.

2. La dépense énergétique postprandiale (DEPP)

On brûle après le repas, pour la digestion, la transformation et le stockage des nutriments 15 à 25 % des calories des aliments du repas. Donc plus on mange, plus on brûle de calories ! D'autant que le stress lié à la peur de manger, si on est atteint d'anorexie mentale ou de boulimie, augmente la quantité de calories brûlées. Dans un repas, on brûle plus facilement les protides que les glucides et plus ceux-ci que les lipides.

3. La dépense énergétique liée à l'activité physique (DEAPH)

Bien sûr, on brûle des calories en ayant une activité physique. Le nombre de calories brûlées est fonction de la durée et du type de l'activité effectuée (Tableau 1).

Tableau 1 : Activité physique et dépense énergétique

course.gif

DÉPENSES ÉNERGÉTIQUES  EN FONCTION DE L'ACTIVITÉ DU SUJET

Conditions

Dépenses d'énergie
calorie/minute

Assis, au repos

1

Assis en écrivant

2

Debout, tranquille

2

Marche à plat à une vitesse de 2 km/h

2,5

Marche à plat à une vitesse de 5 km/h

4

Marche sur une pente de 5 % à 6 km/h

6

Course à pied à 9 km/h

12

Nage (brasse) à 30 m/min

7

Nage crawlée à 55 m/min

14

Course de 5 km à vitesse maximale (sujet entraîné)

20

Le rendement général de la " machine humaine " est de l'ordre de 30 %, c'est à dire que lorsqu'on brûle 4,5 kcal/min, le travail fourni n'est que de 1,5 kcal/min. Le reste est brûlé et évacué sous forme de chaleur et de transpiration.

1.2. Dépenses énergétiques lorsque le poids se modifie

Que l'on comble un déficit pondéral ou que l'on perde du poids, la DER et la dépense énergétique totale des 24 h changent. Lorsque l'on prend du poids, la dépense énergétique augmente et les besoins caloriques avec elle. On peut donc manger plus, tandis que le poids peut se stabiliser. Lorsque l'on perd du poids, la DER diminue et les besoins caloriques avec elle. On doit donc manger moins pour stabiliser le nouveau poids.

1.2.1. Le cas de la prise de poids

Prenons l'exemple de Delphine, une malade atteinte d'anorexie mentale âgée de 20 ans et qui pèse 35 kg pour 1,63 m. Nous l'avons dit, pour stabiliser ce poids de 35 kg, ces apports quotidiens doivent être de 1600 kcal/j. A ce poids, la seule dépense énergétique de repos sera de 1100 kcal/j. Delphine, pour défendre le poids de 50 kg (ne pas maigrir) devra manger à hauteur de 2100 à 2200 kcal/j et ceci pour trois raisons :

1. La DER aura augmenté parallèlement à l'augmentation de la masse musculaire ;
2. Delphine aura plus d'activité physique et celle-ci lui coûtera 100 à 200 kcal/j ;
3. Si elle n'est pas tout à fait guérie, elle restera angoissée et, par peur de manger et de grossir, brûlera des calories supplémentaires du fait même de ses angoisses. Ceci représente sans doute 100 à 150 calories supplémentaires.

Mais ce n'est pas tout. En effet, pour passer de 35 à 50 kg, il faut bien fabriquer ces 15 kg de matières vivantes (muscles, un peu de poids en plus au niveau des organes, tissu adipeux).

Or, créer de la matière vivante coûte cher. Cette fabrication nécessite à la fois l'énergie contenue dans la matière vivante plus l'énergie nécessaire à sa fabrication. C'est comme pour fabriquer un mur de briques : il faut mettre l'argent des briques + le salaire des ouvriers qui posent les briques.

Le coût d'une prise de poids idéal est connu : 100 g se "paient" 750 calories.

En d'autres termes, ceci revient à la chose suivante : si Delphine, au poids de 35 kg, accepte de prendre 100 g de poids chaque jour, il lui en coûtera 2420 kcal/j, soit ses besoins de 1670 kcal/j pour stabiliser son poids + les 750 kcal/j, pour prendre 100 g par jour !

Or, 100 g/j, comme dirait M. de la Palisse, c'est 1 kg en 10 jours. Sur le long terme, il ne peut pas en être autrement. C'est en effet une loi universelle : toute prise de poids différente sur la balance ne peut pas être autre chose que le reflet d'une augmentation de l'eau du corps.

Ainsi, si Delphine mange à hauteur de 1500 kcal/j, en se forçant à saler ses aliments pour leur donner du goût, elle peut prendre 1 à 1,5 kg en une semaine, sans avoir pris un gramme de " vrai " poids !

Pour conclure, pour qu'une patiente anorexique prenne du poids durablement, il faut qu'elle se batte dur et longtemps. Qu'elle n'ait pas peur d'une prise de 1 kg alors qu'elle n'a pas mangé beaucoup plus qu'avant ! Car, malheureusement (pour elle et pour le médecin !) ce kilo disparaîtra vite. Ce n'est que de l'eau.

Que Delphine n'oublie pas non plus qu'en prenant du poids, elle augmente ses besoins. Pour continuer à prendre 100 g chaque jour, elle devra manger un tout petit peu plus au fil du temps : à chaque prise de 5 kg, elle devra ajouter 100 calories supplémentaires à son régime.

1.2.2. Un obèse maigrit : sa dépense énergétique de repos aussi

Prenons l'exemple de Nathalie : Elle a 30 ans, mesure 1,63 m et pèse 80 kg. Du fait de ses crises de compulsions alimentaires, ses apports caloriques moyens s'élèvent à 2500 kcal/j.
Le régime, parfait, prescrit par le médecin nutritionniste (ou la diététicienne) , adapté à ses besoins apporte 2000 cal/j. En effet, Nathalie est physiquement assez active et ceci représente les besoins calculés pour stabiliser son poids à 60-65 kg.

Elle mangeait à hauteur de 2500 calories par jour et son poids était stable. On lui donne un régime à 2000 calories. Le déficit est de 500 calories. Ceci veut dire qu'il " manque " à son organisme 500 calories venant de l'extérieur (de l'alimentation). Elle tire donc ces 500 calories de son tissu adipeux (des réserves).

Il lui en coûte 8 calories au gramme. En d'autres termes, avec ce déficit de 500 calories, elle va perdre 60 g/j (500 / 8). Soit seulement 600 g en 10 jours. Pas facile à voir sur la balance !

Alors que ce déficit de 500 calories représente pour Nathalie un gros effort : ceci revient à lui enlever 20 % de sa ration calorique.

Il n'est donc pas possible de perdre 1 à 2 kg/semaine…

Mais, en outre, comme la nature est économe, au matin du 4ème jour, l'organisme aura mis en place une véritable " stratégie " anti-gaspillage. Il va réduire ses dépenses de 10 %. Mais 10 % de 2500 calories (ce qu'il dépensait par jour) font 250 calories. Donc, dès le 4ème jour, Nathalie ne brûle par jour plus que 2250 calories. Donc la différence entre dépenses et niveau du régime n'est plus que de 250 calories. Et Nathalie ne perd plus que 30 g/j (300 g en 10 jours !).

Puis en perdant du poids, elle pèsera moins lourd. L'organisme se " débarrassera " alors d'un peu de muscles et les besoins continueront à diminuer.

A un certain moment, les besoins atteindront les 2000 calories du régime prescrit et Nathalie arrêtera de maigrir.

A ce stade, si Nathalie veut continuer à maigrir, il faudra baisser un peu le niveau calorique du régime. C'est dire s'il est important que Nathalie comprenne que un projet d'amaigrissement n'est pas une course de vitesse (impossible) mais une nouvelle gestion de son alimentation ainsi qu'un autre regard sur son poids.

Or donc, Nathalie, si vous êtes grosse et souhaitez maigrir :
Pesez le pour et le contre
Faites vous prescrire un régime modérément hypocalorique
Suivez le avec convivialité ; Augmentez un peu votre activité physique
... et ne vous pesez qu'avec modération (ou pas du tout ?)

BON COURAGE

 

Publié en 2005