Anorexie, boulimie, compulsions alimentaires : l'association peut vous aider à voir les choses Autrement

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Sortir du TCA pour aller vers soi avec les thérapies humanistes


Mme Angélique GIMENEZ, psychothérapeute (titulaire du CEP) et
enseignante en PNL (Trans en Provence)
 

Introduction : A une époque où différents types de thérapies sont proposées à nos patients, il est important de préciser ce que chacune apporte.
La thérapie humaniste au sens large du terme (impliquant l’esprit « humaniste ») évoque ses liens avec la programmation neurolinguistique (PNL) dans son approche humaniste. Elle est très « habitée » par la pragmatique de la PNL, ses fondements linguistiques et neurophysiologiques et la foi en l’inconscient humain défini comme un puit de ressources par Milton Erickson. Nous nous attacherons à montrer comment ces thérapies fonctionnent et ce qu’elles apportent aux patients souffrant de troubles du comportement alimentaire (TCA).

1. Les thérapies dites humanistes : généralités

De nos jours, les patients qui cherchent de l’aide pour sortir d’un TCA sont souvent démunis devant le nombre de thérapies proposées, à la fois des psychothérapies et des thérapies corporelles. Il faut préciser ici que les thérapies corporelles ne sont pas des psychothérapies et qu’il faut distinguer ces deux approches complémentaires. Si corps et esprit sont liés, le point d’entrée pour retraitement neurologique et sa mise en conscience passe par les compétences spécifiques de la psychothérapie. En psychothérapie, plusieurs approches se côtoient, se complètent et se distinguent : approche symptomatique ou de fond, approches psychanalytique, comportementales, intégratives…

Malheureusement, les non-initiés ne savent pas s’y retrouver ! Il me parait donc essentiel de rappeler aux praticiens que nous avons le devoir d’informer très explicitement nos patients sur les différentes thérapies, de leur préciser dans quel courant nous nous situons et comment nous travaillons. Comment très concrètement se passe la séance, le processus thérapeutique, quel en est le cadre, les règles pour les deux parties et répondre aux éventuelles interrogations du patient avant d’engager le soin. Poser ce cadre permet au patient de s’engager en meilleure connaissance de cause et garanti un cadre de sécurité et d’authenticité entre patient et praticien.

Les thérapies humanistes sont centrées sur le lien à la personne (voir, pour acquérir les connaissances de base, le texte sur les thérapies neuro-émotionnelles. La relation praticien-patient est le socle de la thérapie. Bien définir le fonctionnement et clarifier comment chacun va s’impliquer dans cette relation est donc le préalable « obligé ».

Les thérapies humanistes sont issues des travaux de différents thérapeutes et chercheurs américains dans les années 1960 (création du Mental Research Institut à Palo Alto puis de l’Institut Ensalem, creuset de la psychologie humaniste). Elle propose une troisième voie à l’époque entre psychanalyse et « behaviorisme », tout en reprenant certains de leurs éléments.

La notion centrale en psychologie humaniste est celle du développement personnel. Cela n’est pas sans faire écho aux humanistes français et européens qui prônaient déjà au 15e siècle l’épanouissement humain et admettaient comme une évidence que l’on devient une personne, « Moi, JE, cette personne très précise » au fil du temps, des rencontres, des apprentissages et du milieu dans lequel on évolue. « L’Homme ne naît pas Homme, il le devient » (Erasme, 1467-1536).

La thérapie humaniste est centrée sont une philosophie positive qui part du principe que chaque individu à les ressources pour sortir des situations difficiles et que la solution est au cœur même du problème (Milton Erickson a fortement influencé cette position : la solution est dans le problème). Le thérapeute a la foi en les ressources du patient et il vient aider à remettre en route des processus de développement personnel, de « bien-être », de « bon fonctionnement » qui se sont enrayés ou bloqués. C’est grâce à sa confiance au patient, qu’il va l’aider à remettre en état de bon fonctionnement ses pensées, ses comportements et à mieux ressentir et se sentir, à apprendre à gérer ses émotions, le rapport à soi et à l’autre.

2. Les thérapies dites humanistes : spécificités

Nous présenterons maintenant certains aspects clés des thérapies humanistes, spécificités que nous pouvons retrouver une à une dans d’autres approches et à plusieurs disciplines (psychiatrie, psychothérapie, linguistique, philosophie, biologie, ethnologie…).

2.1. Des présupposés optimistes sur la nature humaine

Ce sont des croyances auxquelles les thérapeutes adhérent (et ont travaillé sur eux-mêmes pour les intégrer et les faire leurs), sans lesquelles, il est difficile de se positionner en tant qu’humaniste.

1. La carte n’est pas le territoire. Chacun a sa représentation de la réalité extérieure et de sa réalité intérieure. Notre représentation n’est pas celle du patient. Le thérapeute doit apprendre à découvrir la carte du monde de son patient, s’y ajuster ouvrir son patient à d’autres cartes. Ce sont les mots du patient qui nous donnent des informations sur sa représentation, la façon dont il filtre le monde.

Le thérapeute doit déposer des préjugés personnels, ses propres jugements de valeur et entrer en lien avec le patient. Il le comprend de l’intérieur s’éloignant de la subjectivité, de la projection et de l’interprétation. Il pourra alors entendre ce que veut dire « je veux guérir sans grossir », le concevoir et aider à transformer la représentation du patient pour aboutir à une formulation et une conception plus écologique « je veux guérir et je peux démaigrir malgré mes peurs ».

2. Toute personne a en elle les ressources nécessaires pour parvenir à son objectif. Si le thérapeute n’a pas foi en la guérison de son patient, son patient le percevra et n’y croira pas non plus. Dans les TCA, les patients sont souvent « usés » par leur maladie et ont besoin de voir que quelqu’un y croit avec eux. Le thérapeute doit être catalyseur de guérison, le « révélateur » de ressources sans agir à la place du patient. Il « l’accompagne » vers l’autonomie. Il est en revanche « garant » d’une évolution écologique du patient et vérifie que l’objectif est réaliste en termes de santé mentale et physiologique (environnementale aussi). C’est là une particularité des TCA. Le thérapeute doit veiller avec ténacité à aller vers une évolution « saine », car les malades veulent majoritairement guérir sans grossir ou perdre plusieurs kilos sans respect de leur équilibre physiologique (l’objectif n’est pas humainement réaliste !). Certains patients souffrant de TCA sont détournés des vrais choix par leur TCA. Le thérapeute doit être un catalyseur-régulateur « musclé ».

3. Tout comportement est généré par une intention positive de l’inconscient (IPI). Selon Erickson, l’inconscient est un puits de ressources bienveillant pour l’humain. Un comportement (action ou parole, inaction ou non-dit…) ne se met pas en place par hasard. Il répond les premières fois à une intention plus ou moins motivée et consciente. Avec le temps, ce comportement devient limitant, handicapant car il n’est plus adapté. Pouvoir le transformer de façon durable devient beaucoup plus respectueux du patient quand il retrouve l’intention positive inconsciente qui a initié ce comportement. Cela permet de lever la « résistance » au changement. Qui voudrait abandonner un comportement qui avait pour but initial de donner de l’amour, du soulagement, du réconfort, de la présence… (qui font partie des IPI qui émergent chez les patients) ?
L’inconscient est notre mémoire sensorielle, zone-mémoire de nos archives personnelles « zippées », non consciente au quotidien. Si la bonne intention est restée dans cette mémoire « zippée » à laquelle le patient reste fidèle, il est en lutte avec sa conscience actuelle, qui lui dit que le comportement n’est pas bon mais sans pouvoir en changer. En rapportant au niveau conscient l’intention positive inconsciente, une négociation devient possible pour agir autrement, tout en respectant cette intention. Le patient reste ainsi cohérent et loyal à lui-même, à tous les niveaux.

4. Nos limites sont les représentations de nos limites. Nous avons une représentation limitée de la réalité, et donc de nos ressources, de nos possibilités d’action, de nos compétences. Souvent, des croyances nous limitent : « je suis nulle, je ne guérirai jamais, personne ne m’aime… ». Ces croyances limitantes se sont installées à notre insu, martelées par des figures d’autorités, ou montrées si elles ne sont pas dites (« Elle me disait que j’étais jolie mais ne se promenait jamais avec moi, détournait son regard…Cela prouve bien qu’elle mentait et que je suis moche… »). Le thérapeute encourage son patient à faire de nouvelles expériences pour dépasser ses limites et lui montre, avec congruence, que lui croit en sa guérison, qu’il la trouve jolie …
Le thérapeute aide à découvrir toutes les peurs, les émotions négatives « accrochées » aux croyances négatives et développera la confiance en soi, la « sécurité intérieure » du patient pour qu’il dépasse les limites passées de l’enfant. Il encourage son patient dans « l’ici et maintenant » et l’encourage à faire face, à l’âge qu’il a, à ce qui avait été chez lui une vraie limite dans l’enfance, enfance maintenant dépassée.

5. A un moment donné de sa vie, chacun fait le meilleur choix possible. Nous faisons des choix dans un contexte et avec des ressources données au moment « t ». Le thérapeute peut amener son patient à comprendre ce qu’étaient ces options et ces critères qui ont alors motivé ce choix. C’était possiblement un des « bons » choix possibles alors. La maladie n’est pas un choix conscient. Aucune malade ne choisit de développer une anorexie, une boulimie, une hyperphagie. C’est pourtant, à un moment donné, le seul moyen que la personne a trouvé pour avoir le sentiment de maitriser, de combler un vide…. C’est peut-être la seule liberté de choix que l’adolescente ait eue…devenir mince (« j’aurai moins de soucis au moins avec mon image », s’est-elle dit alors). La maladie est une mauvaise réponse à un vrai problème, et c’est bien insidieusement que le choix de maigrir ou de se faire vomir ou de dévorer du sucré se transforme en TCA. Ce présupposé est aidant pour accompagner le patient à garder la responsabilité de ces actes, ces choix et à ne pas culpabiliser, se rejeter soi-même. Initialement, il ignorait que le TCA allait s’installer et comment il le ferait, mais son choix de se sentir mieux était légitime. Il convient de lui montrer à faire AUTREMENT.

6. Le corps et l’esprit sont un seul et même système : ils sont indissociables. Quand nous agissons sur le comportement et la physiologie, nous intervenons sur la manière de penser et de sentir, et quand nous intervenons sur la manière de penser et de sentir, ceci a un impact sur la physiologie. La thérapie est réellement efficace quand le patient peut penser autrement, mais aussi voir, ressentir, entendre, sentir et goûter autrement. Ses pensées ne seront plus associées qu’aux seuls comportements, mais aussi à de nouveaux états d’être. Le patient accède aussi à ses émotions et à sa sensorialité.
Dans les TCA, les patients n’ont souvent plus « qu’une tête » et parlent de « ce corps » comme d’un étranger. Il y a une vraie déconnection avec les niveaux sensoriel et émotionnel. Le thérapeute va aider le patient à reprendre contact avec ses sens, en commençant par ceux de moindre « résistance », en focalisant sur des sensations agréables pour « rétablir » les connexions et « ré-ouvrir les entrées » au niveau du thalamus.
Le thérapeute aura souvent à faire preuve de créativité, d’imagination, d’ouverture lui-même et à répéter un grand nombre de fois combien il est essentiel de sentir, voir, entendre pour qu’un jour le patient ose. Il donnera de petites tâches expérimentales, partant du principe que les grands changements s’opèrent avec de toutes petites modifications expérimentales au quotidien (en poussant sur le plus petit rouage du mécanisme, on fait moins d’effort et on débloque le processus tout en stimulant le principe de satisfaction d’avoir « réussi », de récompense). Schématiquement, on peut dire que le cortex droit est associé au principe aversif et holistique (généralisation du ressenti négatif) alors que le cortex gauche régit le principe d’essai, de plaisir, du détail, (donc de non généralisation et d’accès à l’expérience et au plaisir). Les petites tâches réussies stimulent le cortex gauche !

7. Nos échecs sont des sources d’information qui nous invitent à agir autrement. «Quand tu te plantes, tu pousses ! ». C’est une invitation à recadrer le sens du mot « échec » et à encourager nos patients aux nouvelles expériences. C’est accepter nos limites du moment et nous encourager à les repousser, en faisant l’expérience des meilleurs moyens pour ce faire. Nous rejoignons le principe de la thérapie dialectique (Marsha Linehan, psychologue à Seattle, 1993) : l’apprentissage comme une source d’enrichissement. L’humain apprend de ses erreurs aussi ! L’expérience qui mène à un échec est enrichissante et développe nos compétences, y compris celles de « rebondir ».

8. Le sens de notre communication est donné par la réponse que nous recevons quels que soient nos intentions ou nos sentiments. Il est intéressant de se demander pourquoi l’autre ne nous a pas compris : étais-je suffisamment en lien, en accord avec sa carte du monde ? La résistance du récepteur est un commentaire sur le manque de flexibilité de l’émetteur, sur sa difficulté à établir ou à maintenir une bonne communication. Dans le cas du thérapeute, c’est bien lui qui doit s’ajuster au patient pour en être compris et le comprendre. Peu à peu, par exemple en thérapie de groupe, il peut amener le patient à prendre aussi la responsabilité de sa façon de dire de ce qu’il dit. Les patients TCA sont souvent très sensibles aux mots, à la façon dont ils sont dits (communication analogique ou non-verbale). Le thérapeute doit prendre la responsabilité d’ajuster sa communication pour une parfaite congruence entre le niveau digital (verbal) et analogique (non-verbale, posture, gestes, etc), et de l’accueil de la relation (et du contre-transfert).

Une posture solide et bienveillante : Le thérapeute doit être à la fois très ouvert, empathique avec le patient et en même temps guidant et ferme. Il est confiant en l’humain sur sa capacité à apprendre, à évoluer, à dépasser ses peurs ; il est donc confiant en cela pour son patient TCA même après 20 ans de pathologie (n’est-ce pas ? Je vous invite à vérifier en vous ?).
Il utilise largement la mise en rapport (rapport analogique et digital) pour « com-prendre » le patient puis, lien de confiance et de large compréhension installé, il le guide. Il l’accompagne à retrouver le chemin d’un état « non malade » en verbalisant les pensées (en recadrant et en reprogramment les croyances négatives), en mettant en image (imagerie mentale mais aussi expression artistique, réveil de l’imaginaire et imagination) et en accompagnant pas à pas, par stimulation sensorielle en cabinet, et par expérimentation entre deux séances. Le savoir-être est crucial et rend « consistant » le savoir-faire. Si vous manquez parfois de savoir-faire, le patient TCA s’en remettra mais si vous manquez de savoir-être, solide et bienveillant, il en gardera des traces ou, au mieux, changera de thérapeute.

2.2. Un travail à tous les niveaux : intellectuels, sensoriels, émotionnels et relationnels

La thérapie humaniste est centrée sur l’ici et maintenant en abordant le patient non seulement sur ce qu’il pense et la façon dont il se comporte mais aussi sur son ressenti, son état interne, ses sensations et ses émotions. Le praticien associe le patient à ses expériences et aide au retraitement « sensoriel » et « cérébral », en accompagnant et en contenant les émotions, en recadrant la représentation que le patient se faisait de cet épisode de vie. A sens inverse, il sait aussi dissocier le patient des ressentis négatifs pour l’aider à un retraitement mental des expériences vécus, hors emprise émotionnelle, puis le réassocier à une sensation plus apaisée en ré-évoquant l’épisode récemment douloureux. La thérapie humaniste utilise la physiologie (et le mouvement des yeux, l’orientation spatiale…) au service de la neuropsychologie et inversement. Elle invite à une large souplesse du praticien et à l’équilibre entre processus mental, comportements et état interne. Le praticien guide ensuite (et sert de modèle, de support d’identification) le patient vers cette même souplesse.
Dans le cas des TCA, le processus mental a pris le contrôle sur la physiologie.

A d’autres moments, quand le patient est perturbé par une émotion (dont il ignore le plus souvent la nature et parle d’angoisses…), il n’a plus du tout de processus mental ; il est dans la compulsion et le passage à l’acte irraisonné.
La thérapie humaniste aide, par décodage fin et installation de petits changements structuraux, à transformer ces stratégies séquentielles, dissociatives et pathologiques en stratégies plus saines, en réussite à « sentir/ penser/ agir avec justesse ». Enfin, la thérapie humaniste se base sur la structure de la relation patient-soignant et regarde ce binôme comme un système. L’un est influent sur l’autre et c’est la dynamique entre les deux qui fait évoluer le système et le patient. L’approche systémique s’étend au-delà de cette diade en intégrant le système dans lequel vit le patient, ce système étant lui aussi influant. Le thérapeute facilite les liens positifs et participe, en médiateur, à restaurer des relations thérapeutiques au sein du système.

2.3. Une thérapie du « comment » et par le « comment » plutôt que le pourquoi

Le thérapeute s’intéresse au passé comme support du présent et de l’avenir. On ne peut pas renier ce que nous sommes mais apprendre à regarder notre parcours de vie avec ce qui le compose, y compris nos moins bons choix. Il regarde comment se sont installés les éléments propices au développement du TCA pour mieux trouver d’autres voies. Si cet état des lieux d’une époque à mener à la pathologie, nous regardons comment il « est » pour mieux le transformer en autres choses (pensées, contexte, ressentis, comportements…) qui mèneront à un état « sain ». Nous travaillons au changement, comment trouver un nouvel équilibre psychique et physiologique.

La transformation (et la guérison du TCA) ne s’arrête pas à la seule disparition des symptômes ; c’est une transformation en structure, en profondeur pour que le patient soit heureux d’être qui il est, et soit donc conscient de qui il est, de son potentiel et, quitte à sembler un luxe, de ce que lui a apporté ce passage dans le monde des TCA.

En quoi cette tranche de vie « pathologique » l’a fait évolué et devenir la personne de maintenant. Tant qu’à traverser des zones de souffrance, donnons-leur une utilité et regardons les comme des occasions d’apprentissage. L’itinéraire TCA a été une erreur sans doute, rendons-là fructueuse. Un humain a besoin de reprendre le contrôle de sa vie (dans les TCA, le contrôle est mal placé – il faut le remettre au service du chemin de vie et de croissance), de comprendre ce qui lui arrive et lui est arrivé et de se sentir compris. Enfin, pour résilier, il a besoin de trouver du sens à ce qui lui est arrivé. Le thérapeute humaniste sait restaurer les piliers d’une vie saine ; il aide le patient à restaurer les valeurs fondamentales de sa vie et, en cela même, à donner du sens à qui il est et à sa vie, à ses expériences de vie. Nous trouvons en arrière-plan les travaux d’Abraham Maslow et la pyramide des besoins humains, les niveaux logiques de Robert Dilts et les travaux sur la prévention des traumatismes plus récents. Le comment permet d’avancer vers l’avenir et la « réparation » et détache du pourquoi plus culpabilisant et « immobilisant » (dans le passé d’ailleurs !).

3. Etre un praticien humaniste

Nous utilisons ce terme de praticien pour signifier que chaque soignant, même s’il ne suit pas l’intégralité du cursus, pour devenir psychopraticien humaniste, peut se former à l’approche humaniste en travaillant sa posture, sa relation à l’autre et sa communication. Indépendamment de sa profession, chacun de nous peut rendre son savoir-être spécifique (diététique, psychologie, médecine…) plus fructueux et efficace en travaillant sur sa communication, son transfert-contre-transfert, ses ressources personnelles et la connaissance de soi (nos compétences mais aussi nos limitations).

Quelques instituts de formation et des professionnels de la thérapie humaniste forment et supervisent les soignants pour développer cette attitude humaniste qui fait que le patient se sent reconnu au-delà de sa pathologie. Etre un bon « humaniste » et connaitre les TCA sont les deux conditions pour devenir un bon accompagnant dans le cadre de ces pathologies. Il est indispensable de travailler sur soi et d’intégrer pleinement les présupposés de base pour pouvoir « habiter » cette attitude qui permet au patient de se sentir accueilli chaleureusement, compris même quand il expose une chose et son contraire, soutenu, encouragé, valorisé et aiguillé avec tact et fermeté. Le praticien est plus tenace que la maladie, a foi en son patient (plus que celui-ci n’a foi en lui à certains moments), facilite et félicite tous les succès même les plus minces mais qui sont ceux qui restaurent la confiance en soi et en la guérison.

Il est à la fois le père, posant les limites et donnant la direction, et la mère, entourant de chaleur et d’empathie. Il crée dans la relation thérapeutique les éléments essentiels pour que les parts « blessées et immatures » du patient reprennent leur croissance en toute sécurité, bien cadrées et encadrées. Il est le parent autorisant temporairement une forme de dépendance « nourrissante » puis le parent qui pousse vers l’autonomie et un nouvel envol « tu peux être toi, fier de toi…tu n’as plus besoin du TCA, tu n’étais pas le TCA, juste une personne en peine de croissance».

Le praticien humaniste rend le droit d’être soi à celui ou celle qu’on avait appelé « anorexique, boulimique ». Il sait que si une part de l’être est « parasité par le TCA », il y a bien d’autres parts de l’identité dont il saura stimuler la croissance si bien que la part « TCA » n’aura plus de motif/ motivation à perdurer. Le thérapeute voit la personne et se montre en personne, dans son humanité, son authenticité et ses limites parfois. En restant faillible par moment et en dépassant ces erreurs, il aide le patient à évoluer et lui montre comment apprendre et rebondir de ces erreurs. Le thérapeute humaniste est « accessible » et imparfait ; il est humain en cela. Par contre, il sait s’autoréguler, repérer, verbaliser et composer avec ses erreurs pour en sortir grandi et faire grandir son patient. Il est lui-même aidé à savoir cela en suivi des formations et en étant supervisé. Il reste solide et stable, sa foi durable quoiqu’il advienne. Il est la capacité à se mette en permanence en position « méta » (position de recul par rapport à soi et l’autre) pour analyser les processus individuels et relationnels et garantir ainsi un système vivant, dynamique et orienté vers un objectif très précis (et précisé avec le patient) : être « Moi, soi » sans TCA et satisfait d’être cette personne-là.

Publié en 2013