Anorexie, boulimie, compulsions alimentaires : l'association peut vous aider à voir les choses Autrement

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La pilule contraceptive fait-elle grossir ?


1. Conseils contre l'anorexie mentale

1.1. La pilule contraceptive

De nombreuses femmes se plaignent que la « pilule » (la pilule contraceptive) fasse grossir. De plus en plus de femmes sont soucieuses de leur poids et de leur silhouette et attentives à ne pas grossir. C’est bien évidemment le cas des malades souffrant d’anorexie mentale, de boulimie et de compulsions alimentaires. Il est donc important d’apporter une information juste et objective sur cet aspect.

1.2. Qu’en est-il ? La suspicion

La plupart des médicaments contraceptifs sont à base d’hormones œstroprogestatives. Il s’agit le plus souvent d’une association d’un œstrogène de synthèse et d’un progestatif, c’est à dire d’un dérivé de la progestérone, hormone naturelle.

Les ovaires fabriquent plusieurs œstrogènes, l’œstradiol et l’œstrone notamment et la progestérone. Ces hormones féminines se fixent sur des récepteurs, en particulier au niveau de l’utérus. Cette fixation active des fonctions dont dépendent en particulier la fécondation et donc la grossesse.

La pilule contient des « pseudohormones » qui se fixent sur les mêmes récepteurs, mais n’ont pas la possibilité de déclencher les fonctions d’aval. Ces pseudohormones, en fixant sur ces récepteurs, empêchent donc les « vraies » hormones d’agir. C’est de là que vient leur effet contraceptif.

Lors de leur lancement, ces pilules ont fait l’objet de contrôles et d’études scientifiques sérieuses, mais ont été aussi la cible de détracteurs. Certains d’entre eux ont mis en avant que ces pilules faisaient grossir. Cette idée s’est propagée selon l’adage « il n’y a pas de fumée sans feu ». Au point que beaucoup de gens et notamment de femmes en âge de prendre la pilule sont persuadées que ces pilules font prendre du poids.

Ainsi, une étude réalisée en 2003 suggérait-elle que 30 % des 1665 femmes françaises qui prenaient la pilule se plaignaient d’avoir pris du poids en coïncidence avec la prise de pilule (échantillon représentatif de 3600 femmes). Cette étude cependant montait que les1935 femmes qui ne prenaient pas de pilule avaient un poids (un indice de masse corporelle, IMC) identique à celui des femmes qui prenaient la pilule. Un certain nombre des femmes interrogées disaient avoir arrêté la pilule du fait de cette prise de poids : les femmes qui avaient pris du poids arrêtaient la pilule 1,4 fois plus souvent que celles dont le poids était stable : 28 femmes contre 19 dans cette étude.

1.3. Qu’en est-il ? La réalité

Le poids a été suivi avant et après mise sous pilule dans 47 études scientifiques de qualité depuis 20 ans. Bien sûr, la prise de poids n’était pas le critère principal étudié. La durée de ces études était de 3 à 24 mois (le plus souvent 6 à 12 mois). Une moitié de ces études était faite en « aveugle », c’est-à-dire que ni le médecin ni la patiente ne savaient qui prenait quoi. L’autre moitié était faite sur un mode « ouvert » : le médecin et/ou la patiente savaient que la pilule était prise. L’inclusion dans ces études était bien sûr décidée après accord des femmes.

Dans ces 47 études, aucun argument de certitude ne permet de dégager de prise de poids significativement plus grande en rapport avec telle ou telle pilule. Trois autres études ont comparé un moyen contraceptif à un placebo, c’est à dire à un comprimé ne contenant aucun produit pharmacologique. Ces 3 études ont inclus un grand nombre de femmes et ont été effectuées en double insu (ni le médecin ni les patientes ne savaient qui prenait quoi). Aucune de ces 3 études n’a retrouvé une plus grande prise de poids sous pilule.

Deux de ces études concernaient une pilule et la dernière un « patch » (un dispositif oestroprogestatif à coller sous la peau). On retrouve par ailleurs 78 études ayant comparé deux contraceptions entre elles. La moitié de ces études ont été faites en double insu (cf ci-dessus) : seules 3 de ces 78 études ont trouvé une différence de prise de poids entre 2 pilules. La différence moyenne fut de moins de 2 kilos sur 12 mois.

1.4. De quelle prise de poids s’agirait-il ?

La question ne se pose qu’à peine, puisque les études sérieuses n’ont pas confirmé la prise de poids sous pilule. Pourtant, des études physiologiques ont été faites, à une époque où la certitude n’était pas établie. Ces études suggèrent que, s’il y a prise de poids, il devrait s’agir avant tout d’augmentation de l’eau du corps.

Les différents œstrogènes contenus dans les pilules ont en effet un pouvoir théorique de rétention d’eau (activation du système « rénine-angiotensine » et action de type « minéralocorticoïde »). Les oestrogènes de synthèse (ceux contenus dans les pilules ne sont pas « naturels ») ont un effet plus grand sur la rétention d’eau que l’œstrogène naturel. A l’inverse, la progestérone a un effet inhibiteur de la rétention d’eau. C’est pourquoi sans doute, œstrogène et progestérone s’équilibrant dans les pilules contraceptives, aucune prise de poids n’est observée.

Quelques études suggèrent qu’il pourrait y avoir une augmentation de la masse grasse sous-cutanée sous pilule. En fait, la moitié des études effectuées dans ce but n’a rien trouvé. Parmi celles qui l’ont trouvé, la plupart ont été effectuées aux USA. Or, aux USA, on utilise des pilules à base de progestatifs de synthèse qui ont une activité « hormone mâle » (testostérone-like). Ces pilules favorisent une augmentation de la masse grasse abdominale. Elles n’existent pas en France.

Il faut noter par ailleurs un élément qui fait douter du risque de prise de poids sous pilule : puisque ce sont les oestrogènes qui « font grossir », les pilules contenant la même quantité de progestérone, mais 2 fois plus d’œstrogène devraient faire grossir plus que les autres. Or, sur la dizaine d’études effectuées, une seule a trouvé une plus grande prise de poids sous la pilule fortement dosée en oestrogène ; les neuf autres n’ont pas trouvé de différence d’évolution du poids entre les deux types de pilule.

Enfin, une ultime question se pose : si les pilules, notamment en France, ne font pas grossir, les implants contraceptifs sont-ils susceptibles, eux, d’entraîner une prise de poids ? Il existe à notre connaissance 11 études qui ont cherché à répondre à cette question : en moyenne 12 % des femmes sous implants a pris du poids (1,8 kg). Cette prise de poids était plus fréquente aux USA qu’en France (3,3 % contre 1,8 %).

Ainsi donc, malgré l’idée répandue dans l’opinion publique, il n’y a pas de preuve scientifique d’une prise de poids sous pilule contraceptive. Il est possible que ce que les gens et les médecins ont pris pour une augmentation du poids lié à la pilule soit en fait en rapport avec un autre phénomène. Il est plausible par exemple que ce soit tout simplement la prise de poids que l’on observe habituellement avec l’âge. Un certain nombre de femmes en effet prennent du poids entre 20 et 50 ans, c’est à dire pendant la période de la prise d’une contraception, même sans la prendre. Ceci est lié à la diminution modérée du métabolisme de base avec l’âge. Cependant, si l’on peut répondre que l’ensemble de la population ne grossit pas sous pilule, ceci n’exclut pas que de rares femmes puissent, elles, prendre du poids sous l’influence de facteurs hormonaux, dont la pilule.

 

Publié en 2009