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Pathologies gastriques


1. Ulcère gastroduodénal

L’ulcère gastrique et duodénal a vu son approche thérapeutique totalement modifiée (et simplifiée) par l’efficacité exemplaire des inhibiteurs de la pompe à protons (IPP).

ulcere.jpg La preuve de l’intérêt d’un traitement de l’infection à Hélicobacter Pylori a considérablement limité la prescription hygiéno-diététique. Celle-ci a donc moins de pertinence.

Rappelons néanmoins que la consommation élevée d’alcool freine la cicatrisation de l’ulcère, notamment gastrique. Il en est de même du tabagisme. La consommation de lait, si elle apporte un plus immédiat les premiers jours peut accroître la douleur ulcéreuse ensuite, compte tenue de la richesse en calcium du lait (le Ca++ stimule la sécrétion acide). En revanche, dès le 3ème jour, les IPP sont tellement efficaces que cette remarque perd son sens. En revanche, chez les rares malades qui cicatrisent mal, il faut savoir indiquer l’effet négatif de l’alcool et de la cigarette à fortes doses.

2. Gastrites et gastropathie fonctionnelle

La dyspepsie est une entité qui recouvre tous les troubles fonctionnels (sans lésion visible à l’endoscopie) d’origine gastrique.

On distingue les troubles moteurs vrais des troubles de la sensibilité viscérale gastrique. Dans le premier cas, on observe un ralentissement, ou au contraire une accélération, de la vidange gastrique. Dans le deuxième cas, c’est une diminution du seuil de la sensibilité à la douleur qui est en cause.

En cas de trouble de la vidange gastrique, il faut exclure un diabète non insulinodépendant par une glycémie à jeun ou chercher par interrogatoire un diabète insulinodépendant.

C’est ici le lieu de rappeler l’augmentation frappante de l’incidence du diabète non insulinodépendant en France, y compris chez l’enfant et l’adolescent : l’incidence du diabète a doublé en 15 ans. Dans de rares cas, on pourra mettre sur le compte d’une sclérodermie ou d’une amylose le ralentissement de la vidange gastrique.

Il faut insister sur le fait qu’il n’existe clairement pas de preuves de la nocivité d’aliments spécifiques ou de type d’alimentation (quelle qu’elle soit) dans la dyspepsie. Les quelques études prospectives qui se sont penchées sur cet aspect réfutent clairement la responsabilité de certains aliments : en clair, ceci signifie que certains aliments, nettement incriminés par certains malades, n’entraînent aucun symptômes chez d’autres. Pour autant, certains malades rendent « sans discussion » certains aliments responsables de leurs troubles. Il s’agit ici probablement d’un réflexe conditionné issu de la néophobie alimentaire : des douleurs nettes dans les suites d’un repas contenant un aliment « remarquable » (en tout cas remarqué) font incriminé l’aliment.

Pour autant, des études, qui n’ont pas été réalisées en France, ont incriminé chez les malades souffrant d’une dyspepsie non ulcéreuse, l’alcool (cité par 39 % des patients), le café (35 %), les oranges (27 %) et le curry (48 %). Les boissons alcoolisées sont retrouvées comme facteur aggravant de la dyspepsie dans nombre d’études.

Mais, dans la mesure où le rôle des facteurs psychiques dans les gastropathies fonctionnelles est encore loin d’être reconnu par tous les gastro-entérologues, il est important de rappeler certains aspects :

♦ Il est des malades, en particulier des femmes, qui consultent pour douleurs gastriques atypiques, dyspepsie, brûlures rétrosternales. Souvent, à ces troubles, sont associés des symptômes en rapport avec une colopathie fonctionnelle : ballonnements, constipation ou alternance diarrhée-constipation. Il existe souvent, associée, une perte de poids modérée ou un poids qui a « toujours été bas » (IMC < 19 kg/(m)2). Il s’agit souvent de femmes anxieuses, en proie à un mal-être qui se traduit par la souffrance alimentaire. Une fois éliminée, s’il y a lieu, une lésion organique, il faut adopter la démarche suivante :

♦ Appréhender le contexte alimentaire : ce sont souvent des femmes qui mangent mal, peu, jettent un regard négatif sur l’alimentation et le repas. Le profil clinique, dans ce cas, est celui de femmes minces à maigres (IMC < 19 kg/(m)2) qui ont la plupart du temps une alimentation restrictive, pauvre en matières grasses (MG) -elles n’ajoutent aucune matière grasse-, alimentation de laquelle elles ont supprimé les viandes, surtout rouges et les féculents. Leur crainte, qui va parfois jusqu’à l’obsession, est de grossir, de mal grossir et d’avoir de la cellulite. Elles rejettent ce qui est gras, sucré, se mettent peu à table et sont obsédées à l’idée de grossir très vite, si elles cèdent à une alimentation normale. Elles sont souvent obsédées par les « conseils diététiques » les plus farfelus. Elles sont « orthorexiques » : leur unique projet alimentaire est de toujours manger « diététiquement correct », sans jamais aller au restaurant ni avoir de plaisir alimentaire, en suivant de très près les allégations santé concernant les aliments. Elles ont souvent des troubles des règles menstruelles (retard fréquent, spanioménorhée, aménorrhée, règles d’abondance très variable) et une hypofertilité. Biologiquement, il n’est pas exceptionnel qu’on trouve chez elles une anémie modérée (10-11 g%), par carence en fer (microcytaire avec ferritine basse) ou en acide folique (macrocytaire) ou les deux (doser ferritine et folates sanguins).

Le traitement passe par la diversification de l’alimentation, la réintroduction des aliments protéiques comme les viandes rouges et une prise de poids de 2 ou 3 kg. Une alimentation plus diversifiée et plus riche en produits carnés et en MG ajoutées va, deux fois sur trois, supprimer les troubles des règles et corriger l’anémie 4 fois sur 5.
Un cas à part, moins rare que par le passé, est la phobie alimentaire. Bien connue des pédiatres chez l’enfant de 2 à 5 ans, elle s’appelle alors néophobie alimentaire. L’enfant refuse de manger tout aliment nouveau. Phénomène physiologique, il atteint parfois de telles proportions que l’enfant ne mange plus rien. Ce trouble est maintenant décrit chez des jeunes femmes (20-30 ans). Il peut être secondaire à un événement alimentaire traumatisant : fausse route, sensation d’étouffement, douleur aiguë… parfois, pour des raisons inconscientes, la patiente accuse de plus en plus d’aliments de provoquer chez elle des réactions intolérables, diminue son alimentation et maigrit.
Dans tous ces cas, il n’est pas inutile de se rappeler qu’une fois sur sept, c’est à dire quatre fois plus que dans la population non dyspeptique, la (le) malade a subi un traumatisme sexuel.

3. Cancer gastrique

Le cancer antral a peu de retentissement nutritionnel. La dénutrition y est rare et peu importante. Il est cependant nécessaire de vérifier que les apports en protéines du malade, s’il doit être opéré, sont suffisants. C’est ici également le lieu de rappeler qu’un malade qui est porteur d’un cancer antral et qui a beaucoup maigri a une probabilité assez forte d’être atteint de métastases hépatiques. En revanche, le cancer cardial ou au sein d’une hernie hiatale expose, lui, beaucoup plus souvent à des problèmes nutritionnels :

♦ Il peut engendrer une dénutrition protéique pour plusieurs raisons : blocage pour les grosses bouchées, anorexie sélective pour les aliments protéiques, alcoolisme associé, anorexie et syndrome inflammatoire modéré.

Cette dénutrition peut compromettre un acte chirurgical long et difficile (oeso-gastrectomie polaire supérieure avec double voie d’abord, thoracique et abdominale).
Il a été démontré que la renutrition péri-opératoire réduisait le risque de morbi-mortalité immédiate.

4. Les gastrectomies

gastrectomie.jpg On distingue pour leurs complications nutritionnelles, les gastrectomies partielles et la gastrectomie totale. Le retentissement des gastrectomies est fonction de la quantité et du site de la résection : plus grand est le volume d’estomac retiré et plus fréquents et importants sont les symptômes et les complications ;

Une résection de l’estomac proximal est par ailleurs moins bien supportée qu’une résection antrale ou qu’une résection des deux tiers de l’estomac, du fait d’un cancer antral.

Les conséquences sont aussi fonction du court-circuit d’aval : une résection gastrique associée à une dérivation jéjunale (anastomose gastro-jéjunale de type Finsterer par exemple) est moins bien tolérée qu’une même résection terminée par une anastomose gastro-duodénale. En effet, cette dernière laisse en place le circuit normal et permet au bol alimentaire de se mélanger avec les sécrétions pancréatiques (lipases, amylases, protéases) et à la sécrétion biliaire. C’est en effet cette dernière qui permet la micellisation des lipides et donc leur absorption. De plus, si, au sortir de l’estomac, le bol alimentaire rejoint directement le jéjunum, il ne va pas stimuler les sécrétions bio-pancréatiques. En effet, c’est au contact des premiers bolus qui arrivent dans le duodénum que ces sécrétions augmentent.

On distingue les symptômes et les complications post-chirurgie gastriques.

4.1. Les symptômes

Ils sont de plusieurs types :

1. Sensation de pression intra-gastrique (épigastrique, voire thoracique s’il y a eu résection du tiers inférieur de l’esophage et anastomose eso-gastrique sous la crosse de l’azygos pour cancer cardial par exemple). Douloureuse, elle va faire interrompre la prise alimentaire : le malade mange moins par peur de la douleur ;

2. Rassasiement précoce (diminution de la sensation de faim) induit par la pression engendrée : sensation de plénitude gastrique lié à la réduction du volume intra-gastrique ;

3. Douleurs post-prandiales d’origine duodénale ou jéjunale, par remplissage trop rapide, gênant l’alimentation.

4. Diarrhée post-gastrectomie : elle est fréquente (un cas sur quatre), variable (un épisode/semaine jusqu’à plusieurs par jour, après chaque repas). Elle est liée à l’accélération du transit en rapport avec la résection gastrique (réduction de la capacité de stockage de l’estomac) et la résection du pylore (pyloroplastie faite toujours, dans le but d’éviter la stase gastrique). Cette pyloroplastie est parfois associée à une vagotomie (ancienne opération pour ulcère, cancer cardial) qui a pour effet d’accélérer le transit au delà de l’estomac (au niveau gastrique, la vagotomie ralentit les solides et accélère les liquides). Une autre cause de la diarrhée est, en cas d’anastomose gastro-jéjunale, le court-circuit du duodénum, siège du mélange bol alimentaire – sécrétions pancréatiques et biliaires. Il y a donc diarrhée « faute de temps » (accélération du transit) et faute de mélange.

5. Dumping syndrome : c’est un des symptômes les plus sévères. Le malade ressent, en général assez peu de temps après le repas (20-30 min), un véritable malaise, pouvant aller jusqu’à la perte de connaissance. Il s’agit d’un malaise par hypertonie vagale : hypotension, sensation de vertige non rotatoire, asthénie, pâleur puis bouffée de chaleur. Des troubles digestifs (pesanteurs, diarrhée) co-existent souvent. Le malaise peut commencer parfois très tôt, 5-10 min après la fin du repas (15 % des cas). Les règles diététiques sont simples (fiche « gastrectomies »).

6. Hypoglycémie postprandiale : il s’agit d’un malaise qui survient loin du repas,, deux voire quatre heures après la fin du repas. Le malade ressent une asthénie soudaine, une sensation de perte de connaissance. Les règles diététiques sont simples.

4.2. Les complications

Elles sont avant tout nutritionnelles :

L’inconfort généré par la réduction gastrique induit une réduction de la prise alimentaire, du volume des repas, une éviction de certains aliments jugés à tord coupables (aliments carnés), voire la suppression de certains repas (le déjeuner par exemple, pour pouvoir aller travailler sans malaise). Il y a plus peur de manger qu’anorexie vraie. Enfin, par inconfort, un malade sur six boit (de l’eau) de façon insuffisante.

La dérivation digestive, si elle a eu lieu, favorise la malabsorption : anastomose gastro-jéjunale, voire gastro-iléale en cas de chirurgie de l’obésité. En effet, le bol alimentaire n’entre plus en contact synergique avec les sécrétions bilio-pancréatiques. Les amylases, les protéases et les lipases sont en quantité insuffisante et la rapidité du transit au travers de l’estomac « ouvert » par la résection ou la pyloroplastie génère une insuffisance de mélange entre bol alimentaire et sécrétions enzymatiques. De plus, le mélange imparfait entre bol et sécrétion biliaire (acides et phospholipides biliaires) empêche l’émulsification des graisses, notamment solides, ce qui diminue le rendement des enzymes lipolytiques pancréatiques.

Ceci va entraîner un déficit d’apport qui, au bout de quelques mois, va générer une malnutrition portant sur différents nutriments :

  • l’énergie, notamment lipidique, avec comme conséquence une perte de poids
  • les protéines, avec comme conséquence une baisse de l’albuminémie et de la pré-albumine, mais surtout une moindre résistance aux infections, des oedèmes des membres inférieurs et une asthénie
  • les acides gras essentiels, avec comme conséquence une diminution de la résistance aux infectons, de la cicatrisation et des altérations cutanéo-muqueuses.

4.3. Approche nutritionnelle des gastrectomies partielles et totales

Règles diététiques

Pas de règles impérieuses, mais des options expliquées et données au malade.

La diarrhée et le dumping syndrome sont liés à une accélération du transit : il faut donc en limiter le débit :

1. Multiples petits repas, avec des collations pour arriver à 5 à 8 prises alimentaires par jour.
2. Rappeler au malade que le vin et l’alcool sont des accélérateurs du transit.
3. Réduire les glucides d’absorption rapide (sucre, boissons sucrées, féculents cuits longtemps) en cas de dumping syndrome et d’hypoglycémie tardive.
4. En cas de douleurs et pesanteurs inconfortables : évoquer la possibilité de fragmenter les repas ; conseiller de mâcher longtemps et de prendre son temps (allonger le temps du repas), éviter les laitages et les fruits en fin de repas (les consommer en dehors) ; boire de l’eau avant de commencer le repas et peu pendant.

Données nutritionnelles

Les signes précédents sont aggravés par la dénutrition, notamment protéique. Ils peuvent ne pas apparaître initialement, le malade mangeant peu, mais après plusieurs mois, quand l’appétit est revenu.

Médicaments : essayez dompéridone et trimébutine, 20 min avant les 2 repas ; le lopéramide si diarrhée. Si dumping syndrome sévère (coma), essayer l’acarbose (glucor®), voire la somatostatine retard (onéreux++).

Publié en 2008