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Le sport fait-il maigrir ?


Pr D. RIGAUD, CHU Le Bocage - Dijon

Les sports sont des activités physiques programmées à des fins de compétition et pratiquées dans des lieux prévus à cet effet.
Comme toute activité physique, le sport conduit à une dépense énergétique, dont le niveau (le degré) est fonction de l’intensité de l’activité physique requise.

Donc, en première analyse, la dépense calorique (énergétique) liée à un sport donné est fonction de trois facteurs:

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  1. le type de sport pratiqué ;
  2. l'intensité avec laquelle on le pratique à chaque séance ;
  3. le nombre d’heures hebdomadaires de pratique
Comme toute activité physique, le sport conduit à une stimulation accrue des masses musculaires (ou de certaines masses musculaires). Il s’accompagne de ce fait d’une tendance au renouvellement et à l’augmentation des masses musculaires. A titre d’exemple, un adulte jeune qui fait de la musculation intensivement voit augmenter notablement ses masses musculaires, voit diminuer modestement son tissu adipeux et voit donc augmenter indiscutablement son poids corporel.

On peut donc en conclure que chez l’adulte jeune et en bonne santé, dont l’alimentation est conforme aux besoins, le sport fait grossir !! Tout dépend de quoi on parle. Il s’agit en effet de l’augmentation du poids sur une balance et non pas d’une silhouette dans le miroir.

Trois conditions s’opposent à l’augmentation de la masse musculaire dans l’espèce humaine :

La croissance : un enfant et un jeune adolescent ne peuvent pas, à activité musculaire identique, augmenter autant qu’un adulte leur masse musculaire (on ne voit pas d’adolescents « body-buildés »).

Le sexe : à activité physique identique, la femme développe moins sa masse musculaire que l’homme. Le mécanisme dépend des hormones sexuelles : la testostérone chez l’homme favorise le développement de sa masse musculaire.

L’alimentation : pour un niveau d’activité physique donné, un humain ne peut augmenter ses masses musculaires que pour autant qu’il mange au niveau des besoins nutritionnels des dites masses musculaires. Si, quelle qu’en soit la raison (anorexie mentale, boulimie, état dépressif, pauvreté) le sujet ne mange pas « à sa faim » (c’est-à-dire selon ses besoins), l’activité physique le fait maigrir.

1. Et pourquoi donc ?

Une activité physique soutenue (comme dans le sport) entraîne deux sortes de conséquences :

  1. une dégradation musculaire plus rapide qu’elle ne l’est chez le sujet sédentaire ;
  2. une fabrication accrue de cellules musculaires. Mais cette fabrication ne peut pas se faire aux dépens des autres masses riches en protéines (viscères : foie, cerveau, reins ...). Fabriquer du muscle oblige donc à avoir des apports de protéines extérieurs suffisants. C’est l’alimentation à qui est dévolu ce rôle. Mais le corps n’utilisera les protéines pour faire de la masse musculaire que s’il n’en a pas besoin pour son fonctionnement « calorique ». C’est ce qui explique qu’une malade anorexique qui mange suffisamment de protéines, mais pas suffisamment de calories par ailleurs, perd du muscle, même si elle est hyperactive.

2. Et chez la personne obèse, le sport le fait-il maigrir ?

De nombreuses études ont comparé l’évolution du poids de personnes obèses soumises soit à un régime hypocalorique seul, soit au même régime mais associé à un programme d’activité physique. Depuis 15 ans, les données s’accumulent : différentes durées d’étude, différents protocoles « d’activité sportive », différents niveaux de régime.

On peut résumer ces données de la manière suivante :

  • Il ne fait pas de doute que l’activité physique permette de renforcer l’effet amaigrissant d’un régime diététique.
  • Il est assez fréquent quand ceci a été mesuré, que ces programmes d’activité permettent une un peu plus grande perte de masse grasse.
  • Il est probable que ces programmes réduisent la perte de masse musculaire liée au régime hypocalorique (cf. supra).
  • Mais, la perte de poids que l’on peut en attendre dépend du nombre d’heures hebdomadaires assigné au protocole d’activité physique et du niveau d’intensité de l’exercice.
  • Mais la perte de poids reste, sur la balance, peu convaincante. Les kilos en effet ne « tombent » pas : c’est trois à six kilos en moyenne qui sont perdus en plus de ceux du régime ... par an !!
  • Pour autant, le résultat n’est pas nul, puisqu’il y a, pour cette perte de poids un peu plus de masse grasse et un peu moins de masse musculaire perdues.

En pratique, chez la personne obèse :

La pratique semi-intensive d’une activité sportive chez la personne obèse se heurte en fait à deux types d’obstacles :

  1. L’un est physique : il est un certain nombre de sports que la personne obèse ne se voit pas pratiquer (natation en piscine sous le regard de l’autre, la gymnastique, le demi-fond). Il est un certain nombre de sports dont les obèses sont exclus par leurs pairs (demandez à un entraîneur de football, de basket ... ce qu’il en pense !). il est enfin un certain nombre de sports que l’obèse ne peut tout simplement pas pratiquer : tennis, danse acrobatique, bodysculpt (dangereux pour chevilles et genoux).
     
  2. L’autre est psychologique et social : outre la peur d’être jugé par l’autre (avez-vous déjà rencontré un obèse dans une salle de gym ?), on rencontre une certaine lassitude à se battre et une certaine « nonchalance » face à leur obésité chez un certain nombre de personnes obèses. Enfin, on rencontre plutôt plus de gens obèses dans les lieux ou vivent des gens à bas niveaux de revenus et plutôt plus de salles de gym et de salles de sports dans les lieux où vivent les gens riches, bien moins souvent obèses. Sans compter que l’accès à ces salles ou terrains de sports n’est pas bon marché.

Il faut ici rappeler que par exemple une heure de vélo tel que peut le pratiquer une personne obèse induit une dépense de 150 à 200 kcal. Si c’est 1 h/semaine, ceci fera une dépense quotidienne de seulement 20 à 30 kcal.
Il est donc beaucoup plus important pour une personne obèse d’augmenter très significativement son activité physique de tous les jours que de pratiquer 1 à 2 fois/semaine un sport dont l’intensité ne peut être que réduite du fait de son surpoids.

Il doit donc marcher plus, monter les escaliers à pied, multiplier les petites courses, plutôt que faire une seule course hebdomadaire qui l’oblige à prendre sa voiture. Il faudrait qu’il puisse atteindre l’objectif de 30 min de marche/jour. Cet objectif ne pourra bien sûr pas être atteint en une semaine.

Ceci est vrai chez l’adulte comme chez l’enfant : voir " Sport ou marche ? "

3. Conclusion

Plutôt que de se poser la question de savoir si le sport fait maigrir, il importe de se demander si, dans le cas de la personne considérée, le sport est souhaitable ou non. Si oui, quel type de sport peut-on lui proposer, à quelle fréquence et avec quelle intensité ?

De notre point de vue, la question n’a pas vraiment de sens. Il serait nocif pour l’individu et sa santé de pratiquer à outrance et sans contrôle un sport intensif à des fins de perdre un surpoids qu’il est le seul croire avoir.

Il serait vain aussi de faire uniquement du sport en chambre, en utilisant ces appareils vendus pour « muscler votre corps » (appareils de « fitness »), en oubliant totalement l’aspect convivial du sport. Le sport, comme l’alimentation, est aussi un terrain d’échanges et de découvertes !

Pour en savoir plus

Publié en 2008